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Sandrine Elberg : A la recherche du "moi" moscovite

Consacrer un sujet à une série de portraits amène toujours à se poser des questions. Pourquoi montrer quelque chose que l'on a déjà vu mille fois ? Où est l'originalité ? Que m'apprennent ces photos ? Et puis on repense à Jean-François Leroy (fondateur du festival Visa pour l'Image) qui s'emporte (comme souvent) sur les séries de portraits qu'on lui propose et qu'il rejette en bloc. Pour sauter le pas, il faut être sûr de son choix, du photographe, de la force de son travail. Et on rencontre Sandrine Elberg, toute simple, presque timide. On apprend à la connaître, on découvre qu'à travers ses photos, elle est en quête de sa propre identité, de son vrai "moi". Un grand-père paternel russe la rattache à ce pays. Après un premier voyage moscovite en 2004, surtout consacré à des autoportraits, elle revient en 2006 et commence cette série sur les femmes de la capitale russe. Elle reviendra en 2009 et 2010. " Je ne cherche pas à faire un état des lieux, juste à saisir cette identité russe à travers des femmes de mon âge, photographiées dans leur appartement à Moscou."

Diplômée des Beaux-Arts de Paris, où elle est entrée en peinture avant de prolonger en photo, Sandrine Elberg avance doucement, mais avec une conviction quasi divine, vers ce projet, ces femmes avec qui elle noue un lien. "La première image de Svetlana et Karina m'a mis sur la voie ; depuis, je cherche des modèles. Parfois, je les trouve sur Facebook, la plupart du temps par relations. Le fait que je sois une femme les rassure et puis la perspective de voir leur image dans une exposition les excite." Dévoilant un syndrome Peter Pan chez nombre de ses sujets, Sandrine travaille sobrement, avec un petit flash en cas de besoin, entre le documentaire et la mise en scène. " Sur une série, les cent premières images, je les jette quasiment sans les regarder. Les filles sont trop tendues, rien ne se passe. Puis elles s'ouvrent. Je ne sélectionne qu'un cliché, souvent réalisé dans les tout derniers moments du shooting."

Exposée à de nombreuses reprises depuis un an, Sandrine Elberg prend de l'assurance et a commencé un nouveau travail sur les femmes de l'Est vivant à Paris. Une forme de réciprocité ? L'histoire ne le dit pas, mais l'univers de la jeune photographe commence, lui, à prendre un sens. Peut-être pas pour tout le monde, mais en tout cas pour elle, et c'est déjà énorme. 

Benoît Baume (2010)

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